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  • Colette et Jean-Paul Deremble

Séance 7. Être vrai. La parabole des 2 fils (Mt 21, 28-32). Pistes de réflexions sur l'engagement.

Dernière mise à jour : 20 mars 2021


la vidéo correspondant à cette séance est accessible sur youtube




La parabole des deux fils (Matthieu 21, 28-32)


Jésus selon Matthieu aime parler par paraboles. Il invite ainsi celui, avec qui il dialogue, à réfléchir. C’est particulièrement net dans le texte choisi qui commence par : « Qu’en pensez-vous ? ». Loin de nous réduire à l’apprentissage de formules toutes faites, l’Évangile propose de nous conduire à l’essentiel par l’échange, la réflexion, l’expression de nos opinions, et finalement par la construction d’un acte de foi personnel. Alors mettons notre intelligence en action, c’est le gage de notre liberté, et cherchons à être vrai.


1. Le problème posé par la parabole des deux fils est celui de la réponse à l’appel d’un homme, qui sera appelé père à la fin de l’épisode. Cette réponse est incontournable et urgente parce que nous sommes directement concernés par le fait d’être vrais : c’est essentiel et c’est aujourd’hui qu’il faut répondre. La réponse correspond à un important travail sur soi, elle suppose d’accorder nos paroles à notre action.

Le premier fils répond oui à l’appel, mais il ne va pas travailler dans la vigne ;

le second dit non mais, finalement, fait ce qui lui est demandé.

La réponse n’est pas simple. Ce très court texte, formulé comme un problème de logique, nous oblige à ne pas en rester à une opposition superficielle. Chacune des réponses est soumise au changement et à la remise en question. En fait, il y a du oui dans le non et du non dans le oui. C’est une manière de dire que tout peut changer, que rien n’est définitif. Il est vain de penser que l’on peut s’installer dans une réponse toute faite, du premier coup, définitive. La bonne comme la mauvaise réponse évoluent avec la vie et le temps. Ceux qui connaissent bien la vie des humains savent qu’il est impossible d’éviter la complexité de ce que nous sommes : les penseurs chinois, par exemple, réfléchissent à cette complexité depuis des millénaires et l’expriment par le fameux cercle du yin et du yang.

Il n’y a pas de mauvaise ni de bonne réponse d’entrée de jeu, mais une invitation à réfléchir et plus encore à faire l’expérience, jusque dans les contradictions, de ce que nous sommes. L’Évangile emprunte une voie semblable. Les deux fils sont absolument indispensables l’un à l’autre parce que l’un et l’autre vivent la contradiction, sans laquelle rien n’est vrai en profondeur.


2. Le problème posé par le premier fils est celui du passage de la parole au faire, de l’intention à l’action. C’est bien de dire OUI, encore faut-il agir. Comme au rugby, il faut toujours transformer l’essai en but effectif. L’Évangile insiste sur l’exigence de vérité, qui correspond à l’accord entre ce que nous pensons et ce que nous faisons. Les Perses parlaient de Zarathoustra comme d’un être de vérité. On a dit la même chose avec les récits de la pêche miraculeuse, celui du Samaritain, de la valorisation des talents, avec les Béatitudes... Dans la vie, on dit oui à de nombreuses causes (au sein des familles, dans la société etc.) ; on dit oui rapidement, mais dans la réalité, rien ne change parce que nous ne nous engageons pas vraiment.

Donc, l’Évangile dénonce les paroles toutes faites, les apparences, voire les pratiques magiques ou religieuses superficielles : il veut des actes. Les bonnes intentions ne suffisent pas, elles ne valent même pas grand-chose en définitive. Le piège serait de croire qu’il suffit de donner la bonne réponse pour être sauvé !


3. Le problème posé par le deuxième fils est celui du passage d’une position négative à un acte positif. Voilà une Bonne Nouvelle encore plus percutante. L’Évangile s’intéresse d’ailleurs beaucoup au fils qui dit non parce qu’il est dit qu’après avoir dit non, « il s’est mis à réfléchir ». En se remettant en question, il ne reste pas bloqué dans son refus. Il faut insister sur le travail de transformation toujours possible. Après tout, commencer par s’opposer et désobéir, c’est faire l’expérience de la résistance de l’humain, du désir d’indépendance, c’est surtout partir d’une non-évidence de ce qui est bon et bien, à condition bien sûr de ne pas rester bloqué dans ce refus mais bien d’amorcer une réflexion sur soi-même, une conversion, comme le fils prodigue. L’Évangile nous dit que celui qui fait ce travail sur lui-même peut trouver le bon chemin. Dire non dans un premier temps n’entraine pas une condamnation : une évolution est toujours possible afin de trouver une vérité plus éprouvée par la critique, au terme d’une conversion par exemple. Loin de juger l’opposant récalcitrant, le pécheur, Jésus fait confiance à sa capacité de changer. Il y a de quoi se remettre en question en tant qu’éducateurs et beaucoup à échanger avec les enfants sur ce point.

Le prophète Jonas a aussi commencé par dire non quand il devait aller à Ninive et qu’il a pris la direction opposée jusqu’à ce qu’une baleine (l’expérience de la conversion) le remette dans le bon chemin. De nombreux chrétiens font cette expérience du changement de direction dans la vie pour mieux répondre à « l’homme qui appelle à travailler dans sa vigne ». Ainsi Charles de Foucauld, jeune aristocrate qui veut profiter des plaisirs de la vie, comme le fils prodigue, et qui a même bien du mal à réussir à devenir militaire tant il est dissipé, change d’un coup sa vie pour ne plus chercher à écraser les ennemis d’Algérie par exemple, mais à devenir ses amis en se faisant petit frère de Jésus au milieu du Sahara avec les Touaregs. Il commence par dire non, puis il se reprend et se consacre entièrement à la volonté d’amour de tous les hommes : c’est ainsi qu’il faut comprendre le travail dans la vigne. Voilà une belle invitation à ne pas juger trop vite ceux qui, apparemment, prennent les mauvaises décisions et, bien plutôt, à croire que le geste d’amour vrai est toujours possible chez quiconque.


Le but évidemment de la vie c’est de faire la volonté de celui qui nous appelle à faire fructifier ce qu’il y a de meilleur dans l’humanité, comme nous le récitons sans cesse dans le Notre Père. Cette volonté, à laquelle nous aspirons en profondeur, est la combinaison d’un appel mystérieux, qui vient de loin, et d’un engagement personnel qui vient du plus profond de nous-même. Il n’y a pas d’obéissance aveugle mais une recherche permanente pour mieux se connaître en même temps que l’on cherche à connaître Dieu. Sans oublier que celui qui fait la volonté du Père reste le frère de celui qui qui ne la fait pas et que la fraternité humaine se vit à l’échelle de cette contradiction aux rebondissements incessants.

Réfléchissons-y plus que jamais...

Comme quoi un texte très court, quand il devient une parabole évangélique, pose tout le problème de la vérité de ce que nous sommes appelés à devenir.


« Notre Père, que ta volonté soit faite » Matthieu 6, 10.

« Que ton oui soit oui » (Mt 5, 37)



Le fils prodigue réfléchissant sur lui-même, Vitrail de Bourges, 8, 15

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