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  • Colette et Jean-Paul Deremble

Séance 2 : Avoir confiance. Pistes de réflexions sur la foi

Dernière mise à jour : 20 mars 2021


Séance 2 : avoir confiance, pistes de réflexion

La vidéo correspondant à cette séquence est accessible par ce lien :


1. Le texte évangélique : « la pêche miraculeuse », selon Luc 5, 1-6 :

Un jour, Jésus est debout au bord du lac de Génésareth. Il voit au bord du lac deux barques ; les pêcheurs en sont descendus et lavent leurs filets. Il monte dans l'une de ces barques (…) et il dit à Simon : « Retourne, avance en eau profonde et jetez vos filets. » Simon lui répond : « Maître, nous avons travaillé toute la nuit sans rien prendre ; mais sur ta parole, je jetterai les filets.»

Ils le font et prennent une quantité de poissons si grande que leurs filets se déchirent.

2. Les récits fondateurs de l’antiquité doivent être interprétés selon leur sens figuré

. Dans les temps anciens, lorsqu’on veut transmettre un message essentiel, on le dit avec des symboles.

. Qu’est-ce qu’un symbole ? C’est une expression qui renvoie à une autre réalité. Par exemple être dans la lune renvoie à la distraction. Ce sont deux registres différents. Confondre le sens propre et le sens figuré est considéré en littérature comme un contresens : croire qu’on a un vrai tigre dans son moteur n’a pas de sens…

. Le récit est plein de symboles très utilisés dans l’Antiquité :

- La barque est ce qui nous permet d’avancer dans la vie

- L’eau profonde est le symbole des épreuves, de la mort, des souffrances, les nôtres bien sûr, mais aussi celles du monde

- Les poissons sont l’image de la vie, de l’énergie, cette énergie qu’on trouve en traversant les épreuves.

- Les pêcheurs sont l’humanité qui cherche le bonheur.

- La nuit est une image pour dire qu’on ne sait pas quelles sont nos priorités.

3. La signification de l’histoire

Comprendre ce langage symbolique, c’est comprendre le sens de l’Evangile. Il ne raconte pas le film d’une histoire : il dit, de manière figurée, symbolique, que :

. lorsqu’on part de nuit, donc dans le trouble intérieur, on n’arrive à rien. Pour avancer, il faut d’abord faire la lumière au fond de soi, analyser les difficultés, les nôtres, celles du monde

. il faut entendre la voix qui nous dit : « avance en eau profonde ! », et nous enraciner dans cette confiance, la confiance en nous, dans les autres, dans la vie. C’est un des grands messages de l’Evangile.

. Si on « emmène le Christ » dans notre « barque », c’est-à-dire si on est habité de son amour sans condition, fait de pardon, de bienveillance, de partage…, alors on pêchera des « poissons », c’est-à-dire de l’énergie, de la force, du bonheur en surabondance.

4. Proposer un exemple d’avancée en « eau profonde »

Dans la vidéo, on propose Nelson Mandela.

Si on choisit cet exemple, on peut renvoyer à des petits films sur youtube : https://www.youtube.com/watch?v=F25a9UOo4MQ

Conclure

En proposant de retenir, à chaque rencontre, une phrase forte : après « l’amour est plus fort que la mort », on retient « Avance en eau profonde ».

Les images qu’on voit dans la vidéo :

Fresque de la pêche miraculeuse à la Trinité de Vendôme (XIIème siècle)

Miniature du Déluge (XIIème siècle)

La vague, estampe d’Hokusaï

Le Christ, mosaïque de la Déisis de Sainte-Sophie d’Istanbul (XIIIème siècle)

Nelson Mandela par Claude Klimsa

Annexe : quelques pistes pour réfléchir à la méthode de lecture

Ce passage raconte bien autre chose qu’une histoire de pêche « miraculeuse » : il parle de manière poétique de la manière de conduire notre vie. En réalité, -mais c’est trop difficile, en ce début d’année, de l’expliquer aux enfants-, il s’agit de la métaphore d’un itinéraire pascal : être avec Jésus dans la barque sur les eaux profondes, c’est « mourir » à nos égoïsmes, à nos aveuglements et « ressusciter », c’est-à-dire être dans la « vraie vie », tournée vers les autres.

. Pourquoi les évangélistes parlent-ils de manière codée ? Parce que c’est comme ça qu’on parle de l’« essentiel » dans l’Antiquité : en ces temps, les écrivains savent que le message a plus de force si on le raconte sous la forme d’une histoire : il s’adresse ainsi à notre imaginaire et pas seulement à notre intelligence. Par ailleurs la forme poétique se prête à plusieurs types d’interprétations, ce qui le rend plus riche.

. Comment sait-on ce que signifient ces symboles ?

On le sait parce que, dans l’Antiquité, ils sont utilisés très couramment : ainsi l’histoire d’Ulysse, qui trace symboliquement l’histoire de la vie humaine à travers l’image d’un voyage en bateau, le mythe du déluge, les mythes bouddhistes…

. Est-ce que ces symboles étaient compris facilement à l’époque ?

Oui, précisément parce que les symboles de la barque, de l’eau, du pêcheur, de la nuit, étaient fréquents. Aujourd’hui, nous avons perdu le sens de ces récits parce que notre langage, notre culture ont changé, d’où le risque de les interpréter de manière littérale, naïve, fondamentaliste (un peu comme si, dans 2000 ans, un lecteur tombait sur l’expression « avoir un tigre dans son moteur » et en déduisait que nous mettons vraiment un tigre dans notre moteur...).

. Est-il nécessaire d’insister sur le fait que lecture littérale et lecture symbolique sont incompatibles ?

On constate que la plupart des commentateurs glissent pudiquement sur le miracle et passent très vite à son interprétation symbolique : ils laissent généralement planer l’ambiguïté chez l’auditeur, auquel on laisse croire, dans un flou artistique, que le symbole pourrait être réel et que le sens figuré cohabite avec le sens propre. Mais, de même qu’il serait ridicule de faire croire à l’enfant qu’il y a un vrai tigre dans le moteur, de même il nous semble qu’il ne faut pas lui faire croire que Jésus a voulu améliorer le panier de pêche de quelques pêcheurs, alors qu’il s’agit d’un message fondamental, structurant. C’est une question de vérité du discours.

Le risque, si on veut cumuler sens propre et sens figuré, est multiple :

. l’enfant qui entend qu’il y a eu un miracle s’attache naturellement au caractère merveilleux de la chose : le merveilleux l’emporte sur l’exigence de la signification, qui, elle, conduit à un mouvement profond de conversion. Spontanément on préfère la magie à la conversion… . devenu adulte, il comprendra sans doute qu’aujourd’hui les pêcheurs bretons revenus bredouilles ne peuvent pas compter sur ce genre de miracle. Il comprendra aussi que, devant les problèmes immenses du monde, l’intervention divine en faveur de ces seuls pêcheurs d’il y a 2000 ans discrédite ce Dieu : n’a-t-il pas mieux à faire que de faire gagner ponctuellement un peu d’argent à ces pêcheurs ?

Ces constats lui feront vraisemblablement lâcher ce texte, qui ne lui sert à rien dans sa vie et dont le sens propre est dérisoire devant l’immensité des problèmes du monde.

Autant lui dire clairement que l’Evangile nous demande de nous convertir et d’entrer dans un itinéraire pascal (traverser l’eau profonde) plutôt que de le laisser sur une fausse piste infantilisante.

. La représentation d’un Dieu tout-puissant et magicien, non seulement a peu de chances de résister à la modernité et à la vie adulte, mais est peu conforme à l’image, radicalement opposée, que propose l’Evangile, celle d’un Dieu d’humilité, de pauvreté, d’oubli de soi…

. Enfin, cela habitue l’enfant à imaginer un Dieu surtout soucieux de nos tout petits soucis individuels et égocentrés, ce qui est peut-être attendrissant mais empêche de penser que le message chrétien est grandiose et concerne l’histoire du monde. Car, pendant que des pêcheurs pêchent quelques poissons de plus, le monde se déchire dans la guerre et les violences de toutes sortes.

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